"...don't be stuck in the every day reality, allow yourself to dream, have faith in your wildest dreams." [AaRON]

"Ne restez pas scotchés à la réalité quotidenne. Permettez-vous de rêver. Croyez en vos rêves les plus fous..." [AaRON]

mardi 29 décembre 2009

L'IDENTITE NATIONALE ET AUTRES DERIVES...


 Jacques Prévert


Je n'ai pas encore pris position sur le faux débat lancé par le gouvernement sarkozyste sur l'identité nationale. En tant que Français, je suis constamment ulcéré par tant de choses qui se passent en ce moment dans notre pays que je n'aurais jamais assez de temps ni de mots pour dire tout l'écœurement que je ressens. Le soi-disant  "débat" lancé par M. Eric Besson, sur ordre de M. Sarkozy, sur l'identité nationale est un de ces sujets d'exaspération et de révolte qui me donnent envie de vomir. Comme me donnent envie de vomir la chasse aux clandestins, la mort de SDF, etc. Je suis outré que dans un pays qui est pour le monde le symbole de la culture, de l'équilibre, du respect du savoir, et des droits de l'homme, nous soyons tombés aussi bas. J'ai honte, non d'être Français, car ce serait renier tous ceux qui ont cru en les valeurs de ce beau pays et se sont battus pour elles, sont morts pour elles, mais de vivre ces jours sombres où - sous couvert de Dieu sait quelles "valeurs" - des hommes et des femmes politiques osant se dire républicains, bafouent chaque jour un peu plus ces trois mots qui font l'honneur de la France : LIBERTE - EGALITE - FRATERNITE. Cela rappelle trop des heures sombres que, bien que je ne les ai pas vécues, je ne peux ni ne veux oublier.

Je remercie J.-M. Vallée de Pont du Château (dans Télérama n°3129) de nous avoir rappelé, dans son touchant témoignage sur la mort de SDF, le beau poème de Prévert "Etranges étrangers". Après l'avoir recherché sur Internet, je vous le donne ici à méditer car il est, plus que jamais, d'actualité :

Étranges étrangers

Kabyles de la Chapelle et des quais de Javel
hommes de pays loin
cobayes des colonies
doux petits musiciens
soleils adolescents de la porte d'Italie
Boumians de la porte de Saint-Ouen
Apatrides d'Aubervilliers
brûleurs des grandes ordures de la ville de Paris
ébouillanteurs des bêtes trouvées mortes sur pied
au beau milieu des rues
Tunisiens de Grenelle
embauchés débauchés
manoeuvres désoeuvrés
Polaks du Marais du Temple des Rosiers
Cordonniers de Cordoue soutiers de Barcelone
pêcheurs des Baléares ou du cap Finistère
rescapés de Franco
et déportés de France et de Navarre
pour avoir défendu en souvenir de la vôtre
la liberté des autres
Esclaves noirs de Fréjus
tiraillés et parqués
au bord d'une petite mer
où peu vous vous baignez
Esclaves noirs de Fréjus
qui évoquez chaque soir
dans les locaux disciplinaires
avec une vieille boite de cigares
et quelques bouts de fil de fer
tous les échos de vos villages
tous les oiseaux de vos forêts
et ne venez dans la capitale
que pour fêter au pas cadencé
la prise de la Bastille le quatorze juillet
Enfants du Sénégal
dépatriés expatriés et naturalisés
Enfants indochinois
jongleurs aux innocents couteaux
qui vendiez autrefois aux terrasses des cafés
de jolis dragons d'or faits de papier plié
Enfants trop tôt grandis et si vite en allés
qui dormez aujourd'hui de retour au pays
le visage dans la terre
et des hommes incendiaires labourant vos rizières
On vous a renvoyé
la monnaie de vos papiers dorés
on vous a retourné
vos petits couteaux dans le dos
Étranges étrangers
Vous êtes de la ville
vous êtes de sa vie
même si mal en vivez
même si vous en mourez.


Jacques Prévert
[Merci à : http://www.lescorriges.com/article-19394--prevert__etranges_etrangers.php pour le texte du poème] 

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Nous vous remercions de vos commentaires mais nous vous indiquons que, sur ce blog les commentaires reçus sont automatiquement modérés et que seront systématiquement supprimés tous propos de caractère injurieux, violent, raciste, à caractère sexuel ou attentatoire aux bonnes moeurs. Merci de votre compréhension.